Malgré les sanctions contre la Russie et des sentiments anti-russes en Italie, le SAMBO se développe activement depuis plus de 40 ans. Cela est dû en grande partie à Roberto Ferraris, secrétaire général de la FIAS (Fédération Internationale de Sambo), membre de la commission exécutive de la Fédération Européenne de Sambo et dirigeant de la FIKBMS (Fédération Italienne de Kick-Boxing — Muay-Thaï — Savate — Shoot Boxe-SAMBO). Roberto considère la Russie comme sa deuxième patrie car, il est lié à ce pays, non seulement par son travail qu’il adore, par sa carrière, mais également par sa famille. Roberto a répondu volontiers aux questions de «AN».
— Roberto, quand le sport national des peuples de l’URSS a-t-il attiré l’attention de l’Italie?
— Le SAMBO est apparu en Italie en 1978, quand ont été organisés les premiers championnats nationaux et une équipe formée, prête à participer aux compétitions internationales.
A l’époque, le SAMBO avait failli devenir un sport olympique. Il devait être en démonstration aux Jeux olympiques de 1980 à Moscou, malheureusement, cela n’est pas arrivé à cause du boycott politique de l’URSS.
A ce moment-là, le SAMBO progressait en Italie à travers la Fédération de lutte, mais à vrai dire, il n’y avait pas de vrais professionnels de ce sport.
— Pourquoi les Italiens sont-ils intéressés par le SAMBO?
— En Italie, au début des années 80, le SAMBO a immédiatement pris la troisième place dans les arts martiaux, avec la lutte libre et la lutte gréco-romaine. Mais à cause du boycott, il n’y avait pratiquement aucune opportunité ni aucune incitation à le promouvoir auprès des masses. Cependant, les vrais samboïstes n’ont pas trahi leur sport favori. Nous avons même réussi à obtenir des résultats louables au niveau international, je veux dire des médailles aux championnats mondiaux et européens, ainsi que dans les tournois prestigieux tels que le «Mémorial A. Kharlampiev», qui a lieu de chaque année en mars à Moscou. Pendant trois ans, ce tournoi a reçu le titre de Coupe du Monde.
Au début des années 90, de nombreux sportifs de SAMBO ont émigré de l’ex-URSS et sont allés pratiquer le SAMBO dans d’autres pays. En réalité, ils ont démontré l’efficacité de l’école de SAMBO russe, transmettant aux Italiens l’amour de cette discipline.
Depuis 2002, mes amis samboïstes moscovites m’ont proposé de diriger un club de SAMBO en Italie. J’ai immédiatement commencé par légaliser cette activité par le biais de l’agence afin de promouvoir le sport. Je souhaitais expliquer clairement à mes collègues les principaux avantages du Sambo par rapport aux autres arts martiaux, les méthodes pédagogiques, afin qu’ils comprennent qu’une telle carte gagnante ne devait pas être négligée!
J’ai commencé par «détourner» des entraîneurs de judo expérimentés vers le SAMBO, en organisant des cours de base pour les débutants.
Comme il y a 40 ans, je suis prêt à répéter que le SAMBO est une discipline sportive, d’entraînement, d’éducation et de discipline à part entière. Son succès est inévitable!
— Comment avez-vous personnellement connu Sambo?
— En 1979. J’étais jeune, j’aimais me battre et un jour un ami m’a invité dans un gymnase où il pratiquait le SAMBO. Après la première séance d’entraînement, j’ai senti que ce sport était fait pour moi. Cependant, le gymnase était très loin de chez moi.
J’habitais dans le centre de Milan, à côté du plus célèbre club de judo de la ville, mais l’atmosphère y était très tendue et je me sentais mal à l’aise.
Malgré les protestations de mes parents, j’ai décidé de m’entraîner dans le gymnase éloigné. Trois fois par semaine, je passais plus de deux heures sur la route pour m’entraîner en SAMBO.
Ma mère était très inquiète de mes retours tardifs et aussi du manque de forces pour étudier.
Je me souviens de ma première veste de Sambo bleue: quand je la portais, je débordais de fierté! Je l’ai gardée durant toutes ces années. Qui sait, peut-être que je la donnerai à ma fille cadette ?!
Sans modestie excessive, je peux dire que je suis l’un des premiers vrais samboïste en Italie, vraiment né pour ce sport. Au fil des ans j’ai également beaucoup consacré au judo, mais j’ai eu le coup de foudre pour le Sambo... pour toujours!
Pour le bien de SAMBO, j’ai dû faire beaucoup de sacrifices. Pendant des années, je suis allé me former dans l’ex-URSS (Russie, Biélorussie et autres républiques) pour devenir spécialiste de haut niveau, bien sûr, à mes propres frais.
Au cours de ma carrière sportive, d’abord en tant qu’athlète, puis en tant qu’entraîneur, j’ai participé à de nombreuses compétitions et établi une relation solide d’amitié sincère avec mes collègues russes. Avec certains, nous sommes devenus amis ainsi qu’avec leurs familles depuis plus de douze ans.
Tout le monde en Italie n’a pas été ravi de mon choix en faveur du SAMBO. À un moment donné, mon travail et ma carrière sportive ont été menacés. Si je pouvais remonter le temps, je choisirais à nouveau le SAMBO.
— Quand êtes-vous devenu secrétaire général de la FIAS (Fédération Internationale de SAMBO)?
— Je suis devenu secrétaire général de la FIAS pour la première fois en 2013, puis j’ai été réélu lors des dernières élections de 2017.
Quant à la FIAS, fondée en 1985 par mon ami Fernando Compte (Espagne), je dois dire que ces 10 dernières années, elle a connu une croissance remarquable!
Le président actuel de la FIAS, Vassily Shestakov (Russie), a été en mesure d’organiser une équipe soudée de différentes régions du monde afin de développer le SAMBO à tous les égards: technique, publicitaire, organisationnel et public. Grâce à ce travail, des adeptes du SAMBO sont apparus même dans des pays éloignés des traditions de notre sport.
La FIAS a maintenant un bureau principal à Moscou et un autre bureau de représentation à Lausanne (Suisse), siège du Comité International Olympique.
Le SAMBO est actuellement pratiqué dans 120 pays, dont la plupart (70%) ont une fédération reconnue par les comités olympiques nationaux respectifs.
Parmi eux, des athlètes ont remporté des médailles dans 27 catégories de poids: 9 hommes, 9 femmes en Sambo sportif et 9 en Sambo combat (réservé aux hommes).
Le SAMBO est présent dans les événements multisports les plus importants, tels que les Jeux continentaux, les Universiades, les Jeux des Sports de combat.
Nous avons signé un accord avec le CISM (Conseil des Sports Militaires Internationaux) et nous travaillons pour inclure le SAMBO dans les Jeux mondiaux militaires.
En 2018, les Jeux asiatiques se sont tenus à Djakarta (Indonésie). En juin prochain, les deuxièmes Jeux européens auront lieu à Minsk.
Suivant l’exemple du programme de la Fédération Russe de SAMBO, ce type de lutte est en train de devenir populaire parmi les écoliers et les étudiants italiens. La FIKBMS (Fédération Italienne de Kick-Boxing — Muay-Thaï — Savate — Shoot Boxe-SAMBO) nous aide activement dans ce domaine. C’est la fédération qui fédère de nombreux sports, dont le SAMBO, et qui rencontre également le CONI (Comité International Olympique d’Italie) et le MIUR (Ministère de l’Education).
Au cours des trois dernières années, l’équipe de la FIAS a fait un excellent travail et le 30 novembre 2018, le CIO (Comité International Olympique) a finalement reconnu le SAMBO en tant que discipline olympique.
— Qu’est-ce qui a changé en 2017, quand le SAMBO est devenu partie intégrante de la structure de la FIKBMS en Italie et a été officiellement reconnu par le Comité national olympique? Quelles perspectives cela a-t-il ouvert?
— le 14 février 2017, c’est la date d’adoption de la résolution CONI (Comité International Olympique d’Italie), approuvant les disciplines sportives, y compris le SAMBO.
Je dois préciser que l’inclusion de SAMBO dans la FIKBMS était une décision exclusivement personnelle. En 2016, j’ai rencontré Donato Milano, président de la FIKBMS, et nous avons immédiatement trouvé un langage commun.
En fait, beaucoup de gens se sont tournés vers moi de 2012 à 2016 avec diverses offres «séduisantes», mais ce n’était pas pour l’amour du SAMBO.
Il y a environ dix ans, le SAMBO est devenu un sport national en Russie. Son intérêt politique a également augmenté, notamment en Italie.
Tous les samboïstes avaient hâte d’être connus en Russie à tous les niveaux! Mais le SAMBO ne peut pas être un outil commercial, il doit rester un sport et une école de la vie en bonne santé, telle que je l’avais connu.
Pour que le CONI reconnaisse la Fédération, nous avons besoin de garanties de formation adéquate des éducateurs. Les membres du corps professoral de la FIKBMS suivent le programme de formation CONI SNAQ (École Nationale des Qualifications) et doivent se conformer aux paramètres européens. Avant de se qualifier, nos spécialistes doivent suivre un cours comprenant de la théorie et de la pratique, d’une durée de 50 à 80 heures, en fonction du poste choisi (entraîneur, instructeur ou enseignant).
À long terme, nous espérons participer aux Jeux olympiques de 2024!
— Quelle est la place de l’Italie dans la Fédération Européenne Sambo?
— Du point de vue des résultats compétitifs, bien sûr, la majorité des samboïstes viennent des pays de l’ex-URSS, en particulier de Russie, de Géorgie, de Biélorussie et d’Ukraine.
Les Italiens parviennent également à conquérir au moins une fois par an un podium mondial ou continental en Bulgarie, en Roumanie, en France et en Italie.
Dans notre calendrier de SAMBO, il y a trois tournois nationaux, des championnats individuels et en fin d’année, la coupe d’Italie par équipes. Actuellement, le SAMBO en Italie est pratiqué par 2 000 athlètes d’âges différents. La plupart des samboïstes se trouvent dans les régions de Lombardie et du Latium, mais le nombre de spécialistes et, par conséquent, de clubs sportifs augmente dans d’autres régions, par exemple en Vénétie et dans les îles: Sardaigne et Sicile.
— Selon les statistiques italiennes, toutes les 72 heures, des femmes sont assassinées. Est-il possible d’introduire des leçons de légitime défense au niveau législatif?
— Comme vous le savez, le SAMBO se traduit par «autodéfense sans armes». Le SAMBO a été conçu dès le début pour assurer la sécurité des personnes.
Au niveau législatif en Italie, il existe une pratique judiciaire très précise, qui définit les limites de la légitime défense, mais en réalité, la situation n’est pas la meilleure.
En Italie, il existe des écoles d’autodéfense pour les femmes et pour tous les arrivants, mais leur niveau de formation laisse à désirer ...
J’estime qu’il est de mon devoir de conseiller à nos femmes de n’apprendre qu’avec des entraîneurs qualifiés de fédérations sportives reconnues par le CONI. Les noms de ces fédérations peuvent être facilement trouvés sur www.coni.it.
S’il vous est proposé un entraîneur qui n’est membre d’aucune des fédérations du CONI, soyez prudent! Assurez-vous de demander à ce professeur de quel organisme de promotion sportive est-il membre? Vous constaterez qu’il s’agit d’une simple association de sport non reconnue.
— Qu’est-ce qui vous lie à notre pays à part le travail?
— Je me rends très souvent en Russie, à laquelle je suis attaché non seulement à cause du SAMBO, mais aussi à cause de mon épouse russe Olga et de ses deux filles, l’aînée Valéria a 22 ans, la plus jeune Anna a deux ans. Elles ont une double nationalité : russe et italienne. Ma femme n’est pas une athlète, bien que nous nous soyons rencontrés à l’Académie Internationale de SAMBO de Kstovo (région de Nijni Novgorod), l’une des meilleures écoles de SAMBO.
Dans notre maison, les traditions russes ne manquent pas, j’estime qu’il est important que mes enfants, qui vivent constamment en Italie, n’oublient pas leurs racines.
— Parlez-vous russe?
— J’ai appris le russe en Russie, d’après les manuels scolaires. Je l’ai appris moi-même car je n’ai jamais suivi de cours spécifiques.
Je parle russe avec mes amis, je les comprends sans aucun problème. Mais lors de conférences ou d’événements officiels, je préfère parler anglais.
Katerina MIGULINA